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Mémoire de la présence Française au Maroc à l'époque du Protectorat
 
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 HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.

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Paul CASIMIR





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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyVen 4 Juil - 11:07

280  
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

Voici comment M. André Chevrillon, dans " Un crépuscule de l'Islam ", raconte une des « mis­sions » du grand-vizir El-Mokri :


Un Français, de Tanger, est arrivé hier, ayant fait route avec Si Mohammed-el-Mokri, familier du Sultan, et vizir du Palais, que suivaient sept dames plus lour­dement voilées encore que de coutume. Ce Mohammed-el-Mokri était parti de Fez, il y a deux mois, en mis­sion très secrète et qui intrigua fort à Tanger les diplomates et les correspondants de journaux. En Eu­rope, la presse fît des suppositions : ce personnage allait-il à Berlin ? Causerait-il avec M. Delcassé ? Quelle intrigue nouvelle de la politique mauresque allait-il nouer ?

Sa mission, moins décisive pour les destinées de l'Europe et de l'Afrique, était plus honorable encore, témoignant de la confiance tout intime que lui ac­corde le Sultan. L'argent prêté par les banquiers de France venait de gonfler les sacs du Maghzen ; aussi­tôt, Son Excellence, dont le tact et la gravité sont appréciés de son Maître, avait reçu l'ordre de s'en aller en Circassie et d'y dépenser le nécessaire pour rendre quelque lustre au harem chérifien. Habile à toutes les négociations, il sut vite découvrir en ce pays de la beauté une personne d'expérience qui lui présenta de merveilleuses fleurs de jeunesse.

En connaisseur, en homme d'affaires, il compara, marchanda, finalement se remit en route avec six jeunes filles que suivait leur protectrice.


281  
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE

Car, pour ménager les convenances, chaperonner et donner cou­rage à celles qui s'en vont si loin vers l'inconnu, c'est l'usage, en semblable occurrence, que la dame qui s'est entremise accompagne ses jeunes amies. On va d'abord jusqu'à Stamboul où l'on prendra passage pour Mar­seille ; mais auparavant, si l'on veut éviter des ennuis sur les bateaux européens, il est sage de régulariser la situation. Devant un iman osmanli, tous les rites religieux observés, l'Excellence épouse la procureuse. Dorénavant, c'est un père de famille qui voyage avec sa femme, ses filles et leurs suivantes, elles, empa­quetées de voiles, ne montrant que la fente noire de leurs yeux; lui, très digne, barbe grise, ascétique et pure draperie, parole rare, et les seuls gestes musul­mans qui invoquent et bénissent.

A Marseille, où ces missionnaires marocains ont des accointances, on commande des toilettes pour l'intimité du harem. Parfois survient, présentée par un fournisseur, quelque chrétienne fatiguée des aven­tures et des cafés concerts d'Europe, et que séduit l'idée d'une retraite dans un cloître sans rigueur, auprès d'un Supérieur munificent et pittoresque. Elle s'adjoint à la troupe mystérieuse. De Tanger à Fez, on chemine à toutes petites étapes afin d'arriver en bon point et que le Maître, à la première entrevue, soit satisfait.

Dans la ville sainte, les beautés ont franchi non sans effroi les énormes et multiples clôtures du Palais; elles s'apprêtent à recevoir les sanctifiantes faveurs du Chérif, du Pur qui devient leur Seigneur. Cependant, la bergère du troupeau s'est installée chez celui que depuis Stamboul elle peut appeler son mari : il prend au sérieux ses engagements conjugaux; il ne cherche pas à la répudier.




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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyVen 4 Juil - 11:14

Document hors texte

FEZ. - Vue générale de la Médina

HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 Bascan84



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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 10:20

282  
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

C'est que dans son cœur d'Arabe, il a fait un profond calcul. Il sait bien que les nou­velles recluses, qui s'ennuient et ne connaissent pas une autre âme à Fez, vont faire appeler leur vieille amie de tous les jours. Ainsi, quoi qu'il advienne (et l'intrigue ne cesse pas de menacer un favori), il compte sur elle pour rester en intelligence avec le harem. Contre les venins de la calomnie et de la dis­grâce, il dispose du plus puissant des antidotes : les enchantements de la beauté , du moins tant que celles qui furent ses filles, entre Constantinople et Tanger, demeurent auprès du Maître.


Dans le but tout aussi louable de vouloir con­server un fils à son père, Si Tayeb El Mokri, mi­nistre des Affaires étrangères, des Finances, de la Plume et de bien d'autres choses encore, se cal­feutra non moins hermétiquement que le grand-vizir pendant toute la durée de l'émeute.

Devant le spectacle si émouvant de ce papa et de cet enfant cherchant à se conserver l'un pour l'autre, et tous les deux à la fois pour la grandeur future du Maroc, devant un exemple venu de si haut, tout le monde se barricada dans le Palais.

Il fallut que Si Kaddour-ben-Ghabrit qui lui, en qualité d'Algérien, risquait simplement d'être pris et dépecé, fut assez courageux pour établir le pre­mier les communications entre l'ambassade et le Palais. Tel le Prince Charmant de la Belle au Bois dormant, il escalada des murs et grimpa à des échelles, qui n'étaient pas de soie, pour aller réveiller tous les hôtes endormis du Palais Impé­rial chérifien.



283  
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE


Mais El Mokri, toujours soucieux de sa progé­niture, avait encore réussi à caser un autre de ses fils comme Pacha de Fez-Bali.

Ce bon petit jeune homme avait d'ailleurs d'autres fonctions. N'avoir à commander et à... « administrer » qu'une toute petite ville de cent mille âmes à peine, était indigne des talents d'un fils du Grand El Mokri.

Aussi, pour « arrondir son petit lot », papa le fit-il nommer, en plus, caïd d'une douzaine de tribus insignifiantes, parmi lesquelles celles de la plaine du Sais — qui ne s'étend que de Fez à Meknès — du Zerhoum, des Oudaïa, des Oulad-Aissa, des Fichtala, des Hadjaoua, des Béni Zerhoual, des Béni Qurriaghel, des Ouled el Hadj et des Doui Menia...

Pas plus !

Ce que fit le bon petit jeune homme pendant la Révolution ? Nous le trouvons expliqué tout au long dans les rapports du commandant de Lamothe, chef du service des renseignements, et du général Brulard.


Dernière édition par Paul Casimir le Sam 5 Juil - 10:32, édité 1 fois
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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 10:32


284
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ


Voici ce qu'écrit le commandant de Lamothe :

Les pachas ne savent pas arrêter l'émeute à Fez-Djedid; ils ne font rien pour empêcher le pillage du Mellah qui dure depuis deux jours.
A Fez-Bali, c'est El-Hadj-Hammad-el-Mokri (fils du grand vizir El-Mokri), qui, malgré l'ordre reçu, ne fait rien pour fermer les portes, au moins celles des quar­tiers non envahis et il dispose de 120 rnokhraznis ar­més ! Il a peur, va se terrer dans sa maison ou dans les couloirs de l'Ambassade.


Du général Brulard :

Le général engagea vivement le Pacha à user de son influence personnelle pour brise,!' la rébellion, arrêter les mutins et empêcher la populace de se join­dre aux émeutiers et lui ordonna, pour localiser la révolte, de fermer les portes de la ville dans les divers quartiers conduisant à Bab-Segma.

Le Pacha n'accomplit pas sa mission.


Bien mieux encore : le commandant Brémond qui avait failli être surpris chez lui et massacré, ne pouvant se risquer en ville pour voir si les ordres donnés avaient bien été exécutés, demanda avec insistance au fils El-Mokri si toutes les portes avaient bien été fermées.

El-Mokri affirma que l'ordre avait été exécuté. Il mentait sciemment !

On sait que la ville de Fez est divisée en un très grand nombre de quartiers, fermés par des portes interceptant toute communication entre un quartier et l'autre.


285
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE

Lorsque toutes les portes sont closes, la ville est ainsi fractionnée en une quantité de petits îlots complètement isolés les uns des autres. L'émeute partant de la casbah des Cherarda, c'est-à-dire du haut de la ville, s'est peu à peu propagée, de proche en proche, jusqu'au bas de la ville. Nul doute que si les portes eussent été fermées la révolte eût été loca­lisée; la résistance aurait alors eu le temps de s'organiser et de nombreuses vies eussent été épargnées.

Comme on le voit par les extraits de rapports que nous venons de citer, la première idée du général Brulard et du commandant de Lamothe fut, dès qu'ils eurent connaissance de l'émeute, de donner au fils El-Mokri, pacha de Fez-Bali, l'ordre de fermer toutes les portes pour empêcher la propagation de la révolte.

Le bon petit jeune homme s'y refusa tout sim­plement. Et, bien qu'il ait sous ses ordres 120 mokhraznis armés, « il a peur et va se terrer dans sa maison ou dans les couloirs de l'Ambas­sade » (1).



_____

(1) Au sujet des portes de la ville de Fez, M. le général Pédoya, qui paraît être bien mal renseigné, a dit, au cours de la séance d'interpellation sur le Maroc du 21 juin ;

... " Vous savez que dans les villes arabes, pour localiser les nephras, il y a des compartiments qui empêchent de passer d'un quartier dans l'autre. Croyez-vous qu'on ait songé à les faire disparaître ? Non, on les a maintenus et, par le fait de leur existence, nous avons subi d'autres pertes regret­tables. "

Nous venons de montrer que la vérité est exactement con­traire aux affirmations de M. le général Pédoya, qui dit encore :

... " On a rendu la tâche des troupes de Dar-Dobibagh très difficile en tenant les portes de la ville fermées, comme si on ne voulait pas qu'elles puissent entrer dans la place. Et, pour y entrer, elles ont dû livrer combat, apporter des échelles, monter sur les remparts, enfoncer les portes, subir des pertes considérables. "

Ceci est du pur roman. Jamais, comme on l'a vu dans la deuxième partie de ce livre, les tirailleurs du commandant Philipot, qui sont les premiers et les seuls à être entrés a Fez le 17 avril, n'ont été obligés « d'apporter des échelles, monter sur les remparts, ni enfoncer les portes ».



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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 10:36

Document hors-texte

FEZ. - Bab Dekaken


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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 10:53


286
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ




Le courage n'est décidément pas une des vertus de la famille El-Mokri !
Mais il y avait encore à Fez un autre El-Mokri.

Qu'a-t-il bien pu faire, celui-là ?

C'est le lieutenant Ben-Sedira qui nous répond dans le rapport suivant :

Fez, le 17, à 8 h. 30 soir.

On venait de tuer le sous-intendant militaire Lory, sur sa terrasse. Si Larbi-Mokri était sur sa porte, devant sa maison. A ce moment, il est passé des soldats allant chez le sous-intendant. Il leur a crié : « Sahitou! Sahitoul » (vous êtes victorieux).

J'ajoute que j'ai fait demander à Si Larbi-Mokri de prendre mes chevaux dans ses écuries, par mon voisin Benanni, pour les sauver.
Si Larbi-Mokri a refusé, disant qu'il ne voulait rien avoir des instructeurs français chez lui....

Signé : Lieutenant BEN-SEDIRA.



287
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE


Charmante famille, en vérité !...

Le père se cache dans le palais, sans oser en sortir; Si Taïeb-El-Mokri en fait autant; El-Hadj-Hammad-El-Mokri refuse d'obéir aux ordres qu'on lui donne et est cause do la mort de tous les Français qui se trouvaient dans la basse ville; quant à Si Larbi-EI-Mokri, il acclame les érneutiers aux cris de : « Bravo ! vous êtes victorieux », et refuse de prendre dans ses écuries les chevaux du lieutenant Ben-Sedira, « parce qu'il ne veut rien avoir des instructeurs français chez lui ».

La dynastie des El-Mokri étant toute puissante au Maroc, il y a encore un autre petit El-Mokri qui est seulement... pacha de Tanger.

Deux autres jeunes rejetons n'étant pas encore en âge d'exercer leurs talents de famille au Maroc, font actuellement leurs études en Europe.

On pensera sans doute que le grand-vizir El-Mokri, qui parut apprécier si fort, pendant plu­sieurs années, les charmes de Paris, a envoyé ses fils compléter leur instruction en France ?

Erreur ! Ce grand ami de la France les a envoyés... en Suisse !






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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 11:03


288
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

Le petit jeune homme, le pacha El-Hadj-Hammad, que M. Regnault lui-même a été obligé de destituer, fut d'ailleurs nommé, quelques jours après, " haut commissaire de la Banque d'Etat à Tanger "..., et il n'a rien eu de plus pressé, pour bien prouver sa gratitude envers la France, que d'essayer de devenir protégé espagnol !

Quant à Si-Tayeb, ministre des Affaires étran­gères, des Finances, de la Plume et de bien d'autres choses encore, il a cherché à obtenir — en vain, d'ailleurs — en fin juin 1912, la pro­tection allemande.... C'est lui qui, en 1910, alla à Constantinople recruter les officiers turcs qui devaient servir d'instructeurs aux troupes maro­caines et remplacer les officiers de la mission française. Se souvenant de la « mission » dont son honorable père avait été chargé par Abd-el-Aziz, il n'omit point de ramener, avec les offi­ciers turcs, quelques aimables jeunes filles de Stamboul... qui, pour la circonstance, furent sans doute ses sœurs pendant toute la durée de la traversée !

Mais le grand-vizir El-Mokri avait déjà, lui-, même, de qui tenir. Il était le fils de Hadj-Abslam-El-Mokri, qui, sous le règne de Moulay-Hassan, prédécesseur d'Abd-el-Aziz, remplissait les fonctions d'amin au Dar-Adihil (1).



_____

(1) L'amin, au Dar-Adihil, était chargé de la perception des Meks, c'est-à-dire de tous les impôts non prévus par le Coran, tels que les droits de marchés, de portes, etc.... Les impôts coraniques rentraient dans le Bit el-Mal.


289
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE


C'est ce dernier qui inculqua au grand-vizir d'aujourd'hui et à sa nombreuse progéniture les premiers principes de l'art de résister aux Fran­çais.

Lorsque M. de Marsilly, notre consul à Fez, arriva, en 1894, dans la capitale chérifienne, il chercha à grouper autour de lui tous les indi­gènes d'origine algérienne, ayant une patente spéciale, pour se créer un premier noyau d'in­fluence française.

Mais Hadj-Abslam-El-Mokri veillait. Il réunit tous les notables algériens, au nombre de 300 environ, dans la mosquée Resif, leur tint un discours violemment xénophobe, leur montrant les dangers de l'envahissement français, et, leur ayant versé 60.000 pesetas pour appuyer ses arguments, il les décida à renoncer à leur qua­lité d'Algériens pour se déclarer les fidèles sujets du sultan du Maroc.

Toujours sous le règne de Moulay-Hassan, M. Féraud, notre ministre de France à Tanger, avait décidé le Sultan à faire construire un chemin de fer allant de Fez à Meknès.



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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptySam 5 Juil - 11:07

Document hors-texte

Reçus par le Sultan MOULAY-HAFID ( avant les événements de FEZ en Avril 1912 ) dans la cour de son palais ( à Fez ) , trois officiers de la mission militaire française au Maroc ; de gauche à droite le capitaine LE GLAY, le lieutenant BEN SEDIRA et le commandant MANGIN.



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Carte postée à FEZ en Janvier 1912

Mentions manuscrites datées du 2 Février 1912.


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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyDim 6 Juil - 9:28

290
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

Déjà, on avait envoyé le lieutenant du génie Roger, qui, vers 1887, étudia le tracé de ce chemin de fer.

El-Mokri intervint encore, et, nous opposant une vive résistance, réussit à faire revenir le Sultan sur sa décision. Par le fait de cette inter­vention hostile, le chemin de fer ne fut pas exécuté !

On voit donc combien ont raison tous ceux qui, connaissant les agissements des El-Mokri, de père en fils, affirment que cette famille est la plus antifrançaise de tout le Maroc.

Pour en revenir au grand-vizir actuel, le brave pater familias d'une si intéressante progéniture, en qui M. Regnault a toujours placé sa confiance la plus élevée, il a également donné la mesure de ses sentiments francophiles lorsque, au mo­ment même où il était hébergé par la France, dans cette belle ville de Paris qu'il aimait tant, il commandait en Allemagne plusieurs millions de matériel de guerre, comprenant une batterie Krupp de montagne à tir rapide, avec des quan­tités d'obus et 20.000 fusils Mauser, avec les approvisionnements correspondants.

Le ministre des Affaires étrangères — toujours très bien renseigné — ignorait naturellement ces achats.
Ce fut le capitaine Moreau, officier instructeur d'un tabor chérifien de Tanger, qui les signala en voyant passer à la douane des quantités de canons, d'armes et de munitions allemands !



291
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE

Quelle famille de bons amis de la France que ces El-Mokri !

Et cependant, grâce à la très précieuse protec­tion dont le couvrent encore certains anciens collaborateurs de M. Regnault, Son Excellence El-Mokri continue à exercer ses talents de grand-vizir à Rabat !

Il le fait, du reste, dans des conditions assez avantageuses pour lui, en se faisant louer, par exemple, pour 300 douros seulement par an, le terrain Habbous, sur lequel il fait édifier un somptueux palais, haut de quatre étages; il agit ainsi contrairement à toutes les lois et coutumes musulmanes interdisant formellement de cons­truire sur les terrains habbous, qui ne peuvent être loués que pour la culture. De plus, une partie même de son palais se trouve en zone de servitude militaire, sur laquelle il est également interdit de bâtir !

Les biens habbous, on le sait, sont constitués par des donations, et leurs revenus doivent servir à l'entretien du culte musulman. Or, le terrain qu'El-Mokri a accaparé pour 300 douros par an a rapporté l'année dernière, rien que du produit de orangers, 1.000 douros... et il pourrait être loué 3.300 douros !


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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyDim 6 Juil - 9:52

292  
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

Aussi, les donateurs de ces terrains protestent, disant que s'ils avaient pu supposer que leurs pieuses libéralités serviraient à grossir la fortune du grand-vizir, ils se fussent abstenus. Et ils ajoutent :

— Si les Français n'étaient pas derrière lui, il n'aurait jamais pu accomplir un tel scandale.

Et ils ont cent fois raison.

Le grand-vizir El-Mokri, qui, pendant toute la durée de l'émeute, resta lâchement calfeutré dans le palais, avait-il connaissance des événements qui allaient éclater ?

Un fait tendrait à le prouver : trois jours avant les événements, le 14 avril à 9 heures du soir, il fit partir brusquement pour Tanger, sans aucune explication, son interprète israélite.

M. Le Châtelier, professeur au Collège de France, avec une cruelle précision, pose, dans la Dépêche de Toulouse, le dilemme suivant :

... "Ce vizir des petites femmes pour le lit du maître, ce vizir du Grand Cordon de la Légion d'honneur, ce vizir des thés parisiens et des télégrammes de Copenhague pour alibis berlinois (1), avait omis de vous prévenir du coup de Fez et de vous avertir du coup de Marrakech.



_____

(1) On sait que pendant qu'El-Mokri était à Berlin, iI faisait envoyer à Paris de faux télégrammes émanant de Copenhague, pour faire croire qu'il se trouvait en Dane­mark !



293  
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE


Vous avait-il documentés sur le coup du Souss ? Non ! L'ignorait-il ? Vous le croyez ? Ne serait-ce donc qu'un Pégomas d'imbécillité ? Alors, exportez-le.

Mais, s'il n'ignorait pas ce que sait le moindre Baqqâl des ports, le plus modeste épicier venu du Souss ; s'il vous a tu ce qu'il savait, alors célébrez les rites expiatoires, afin d'honorer les morts de Fez...."

Malheureusement, il serait peut-être trop tard maintenant pour « célébrer les rites expiatoires afin d'honorer les morts de Fez ». Mais il y aurait tout au moins une autre solution — et personne ne s'explique encore comment elle n'est pas intervenue —; elle consisterait simplement à ne pas permettre que le scandale se prolonge plus longtemps, à ne pas tolérer qu'El-Mokrî reste un jour encore grand-vizir du Protectorat français.

Cette mesure serait naturellement accompagnée de la petite formalité préalable consistant à dépos­séder El-Mokri, selon les règles absolues du droit musulman (1), de tous les biens acquis pendant qu'il était en fonctions.



_____

(1) Un article des mieux documentés de M. Michaux-Bellaire, l'érudit directeur de la mission scientifique au Maroc, paru dans la Revue du Monde musulman de juillet-août 1909, établit la légalité de cette mesure :
« Et-Taoudy-ben-Saouda, dit M. Michaux-Bellaire, dans ses Naouazil (Naouazil el Allama Sidi Mohammed Et-Taoudy-ben-El-Taleb-ben-Saouda-El-Mourri, ouvrage lithographié à Fez, sans date, p. 80), cite une lettre que le sultan Sidi Mohammed-ben-Abdallah (ce sultan vivait au XVIII° siècle ; i)létait contemporain de Louis XV ) lui a adressée pour le consulter. La voici :

« Louange à Dieu, etc..,. Au savant distingué, à celui dont les arguments font loi, Sidi Et-Taoudy-ben-Saouda, que le salut soit sur vous, ainsi que la miséricorde et la bénédiction de Dieu !  Ecrivez-nous votre avis sur les trois points suivants :
« Le premier point est relatif aux biens des fonctionnaires du Maghzen, comme les gouverneurs et autres du même ordre ; l'Iman (le Sultan) peut-il prendre, à eux ou à leurs héritiers, les biens qui leur appartiennent et les verser dans le Bit ce-Mal (Trésor public) ? Vous n'ignorez pas que la conscience de ces fonctionnaires est chargée de tout ce qu'ils ont pris aux gens sous des prétextes différents.
Si ces gouverneurs ou leurs héritiers ont vendu ces biens, l'Iman peut-il les reprendre à ceux qui les ont achetés ?..."

Le fagih Sidi El-Taoudy-ben-Saouda cite ensuite sa ré­ponse, d'après l'original de sa propre main :

" Louange à Dieu ! et que Dieu répande, ses bénédictions sur notre Seigneur Mohammed, sur sa famille et sur ses serviteurs !
Réponse à la première, question :

« Quant aux biens qui sont entre les mains des gouver­neurs qui n'ont pas de biens personnels et qui ne possèdent que ce qu'ils ont amassé par l'injustice et par la violence, l'Iman a le droit de les prendre et de les verser au Bit el Mal, s'il ne connaît par leurs propriétaires. S'il les connaît, il doit leur rendre ce qui leur appartient. De même pour les biens des héritiers desdits gouverneurs. Quant à ce qui est sorti d'entre les mains de ces gouverneurs et qu'ils ont vendu, eux ou leurs héritiers, cette vente est définitive et il n'y a aucun moyen de l'annuler.

El-Mouaq a dit: ..." Ibn  Rouchd a conclu dans ce sens en parlant des gouverneurs  injustes, à savoir que ce qui se trouve, entre leurs mains  doit être versé au Bit el-Mal . II a ajouté :

« Quant a ce  qui est vendu, il n'y a pas moyen d'y revenir ». El-Boursouly a dit d'après Ibn-Rouchd :

« Les biens notoirement mai acquis que l'on trouve en la possession d'un  gouverneur doivent être versés au Bit el-Mal ; de même  pour ceux que l'on trouve entre les mains de ses héritiers;  quant à ce qui a été vendu, il n'y a aucun moyen d'y « revenir ».

El-Boursouly ajoute : « C'est ce qui .est d'un  usage courant, d'après la consultation d'Ibn-Hamdein ».



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Document hors-texte

Tombe de Monsieur DECANIS tué avec plusieurs de ses collègues télégraphistes des services marocains le 17 Avril 1912

HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 Baasca41


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294
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

En faisant la même opé­ration moralisatrice pour Si Tayeb, on aurait au total cent cinquante millions au moins. Cette somme, employée à l'aménagement du pays, ferait ainsi retour en partie à tous les malheureux qui, pendant plus de dix années, ont été odieuse­ment dépouillés, spoliés, volés par les El-Mokri.

Qu'attend-on pour accomplir cet acte de saine justice ?

Comment M. Regnault renseignait le gouvernement.

Après l'exposé détaillé que nous venons de présenter, il n'est plus possible de dire que les troubles ont éclaté d'une façon imprévue.

Mais M. Regnault, éternellement souriant, ne savait que répéter : « Je me refuse à croire un mot de tout ce que vous me dites, Son Excellence El-Mokri m'ayant affirmé que tout était calme »



295
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE


Le service des renseignements était dans l'erreur ; l'autorité militaire se trompait ; M. Gail­lard n'y connaissait rien ; personne ne savait ce qu'il disait : seule, Son Excellence avait raison ! Et lui, Regnault, avait décidé que le départ du Sultan aurait lieu, et il aurait lieu....

La catastrophe se produisit !...


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296  
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

Ce fut, tout d'abord, de la stupeur.

Mais elle dura peu. M. Regnault chercha vite à reprendre contenance. En réfléchissant bien, tout n'était peut-être pas perdu... pour lui. On essaierait, tout d'abord, d'étouffer la vérité aussi longtemps que possible; puis, ensuite, cette vé­rité pouvant arriver à se faire jour quand même, à cause des damnés journalistes, il suffirait de dire qu'il s'agissait simplement d'une sédition mi­litaire, uniquement provoquée par la maladresse des officiers.

Tout pouvait ainsi très bien s'arranger... et qui sait ? Le Gouvernement serait peut-être même capable d'aller jusqu'à le féliciter.... Avec les Affaires étrangères, on ne savait jamais! !

En tout cas, il fallait essayer.

Pour que ce plan réussit, il était indispensable, tout d'abord, de couvrir tous les fonctionnaires Maghzen, de façon à pouvoir continuer à dire qu'El-Mokri était le plus grand ami de la France.
On prendrait ensuite une attitude nettement hostile vis-à-vis de l'autorité militaire, pour bien faire ressortir que cette dernière, seule, était res­ponsable de tous les événements.

On va voir avec quel acharnement et quelle ténacité M. Regnault poursuivit cette politique improbe, mettant tout en œuvre pour la réussite de son plan.




297  
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE

Voici, à la date du 20 avril, ce que l'on pouvait lire dans le Temps, d'après les télégrammes de M. Regnault, qui, seuls, pouvaient passer :

II résulte d'un télégramme de M. Regnault que 4.000 hommes suffiront au rétablissement définitif de l'ordre. C'est dire que la situation militaire n'a pour l'instant rien d'alarmant.
Sur l'état intérieur de la ville, les renseinemenls  sont plus vagues. Les membres du Maghzen et les deux pachas se sont e?nployés de leur mieux à calmer l'agi­tation (1) [sic!].


Dans d'autres journaux parisiens, dont les cor­respondants étaient inspirés par la Légation de Tanger, on pouvait même lire que le fils d'El-Mokri, à la tête de ses hommes, avec un courage extraordinaire, parcourait la ville pour rétablir le calme !

Et le Temps, du 20 avril, ajoutait, toujours d'après les télégrammes de M. Regnault :

Ce qui, est des plus rassurant pour nous, c'est que le Sultan, ainsi que toutes les autorités makhziennes à Fez, nous prêtent, dans cette passe critique, le con­cours le plus entier et le plus sincère (sic).


_____


(1) II ne faut pas oublier que les deux pachas dont parle M. Regnault et qui « se sont employés de leur mieux à calmer l'agitation », sont El-Hadj-Brik, le pacha de Fez-Djedid, que nous avons vu inciter les soldats à la révolte en désignant les officiers qu'il fallait tuer, et El-Hadj-Hammad-El-Mokri, qui s'est refusé à fermer les portes de la ville, malgré l'ordre qu'il avait reçu, occasionnant le massacre de tous les Français habitant le bas de la ville.



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Document hors-texte

FEZ. - Avril 1912. - Le mellah, détails du pillage.

HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 Bascan86


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298  
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

Dans les journaux portant la date du 21 avril, alors que, dès le 17 au soir, on était fixé sur la gravité de la situation, on ne parlait encore que de 70 Askris révoltés ! Et cependant une quantité de cadavres avaient déjà été vus et de nombreux corps affreusement mutilés avaient été transportés à l'hôpital !

Le président du Conseil était à ce point égaré par les dépêches de M. Regnault qu'il pouvait ré­pondre, dans une interview reproduite par toute la presse, qu'il ne s'était agi que d'une « chaude alerte ».

Nous retrouvons là les procédés habituels de M. Regnault. Incapable de prévoir quelque dan­ger que ce soit, dès qu'il est obligé de reconnaître qu'il existe, il le trouve insignifiant ou, mieux encore, il le nie.

Déjà un an avant, en 1911, il niait que la si­tuation de Fez fût critique, désespérée, et il cher­chait à accabler de ses sarcasmes hautains ceux qui signalaient le danger — quand il n'allait pas, comme il le fît pour le malheureux Bringau, cou­pable de dire dans le Matin la vérité — jusqu'à mettre tout en œuvre pour les briser et leur faire lâchement perdre leur situation.



299  
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE
Le 24 mars 1911, moins d'un mois avant que le Gouvernement n'envoyât la colonne Moinier au secours de Fez, il se faisait interviewer par la presse et affirmait que la situation de Fez n'était nullement dangereuse.

C'est ainsi que le Paris-Journal pouvait écrire à cette date, sous le titre suggestif : « Les alarmistes continuent », les lignes suivantes, inspi­rées par une autorité qu'il désigne ainsi :

« Une des personnalités françaises les plus au courant des choses et des gens de ce pays ! ». Le Paris-Journal était évidemment excusable de croire M. Regnault au courant des choses marocaines : le quai d'Orsay le croyait bien ! II disait donc, :

 " Avec une opiniâtreté digne d'un meilleur sort, les correspondants de journaux à Fez et do Tanger conti­nuent leur campagne alarmiste. Voilà bien la troisième fois qu'on nous montre le palais de Fez en feu, ses murailles criblées de balles.
— C'est peut-être, nous dit une des personnalités françaises les plus au courant des choses et des gens du pays, le fait d'un représentant d'un journal du matin au Maroc, très antihafidiste, qui télégraphie à Paris tous les racontars indigènes qui lui parvien­nent de la capitale.

Notez en outre que les Beni-MTir et les Aib-Yeressi (?) sont des unités sans grosse importance, de cette agglo­mération de tribus, sans autre décision que le désir commun de ne point payer l'impôt."




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300  
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

Inutile de dire que « le représentant du journal du matin qui télégraphiait à Paris des racontars indigènes avec une opiniâtreté digne d'un meil­leur sort » n'était autre que l'auteur de ce livre !

On a vu, en effet, lorsqu'il fallut, un mois plus tard, envoyer en toute hâte une colonne de 6.000 hommes au secours de Fez, qu'il ne s'était jamais agi que de « racontars indigènes ».

Que penser aussi de cette « personnalité des plus au courant des choses et des gens de ce pays », qui déclare que les Beni-M'Tir ne sont qu'une petite tribu sans importance !

Si, à cette époque, M. Regnault avait eu l'intel­ligence de comprendre ce qui se passait à Fez et n'avait pas grossièrement écarté, dans sa superbe, les avertissements qui lui étaient donnés, quel­ques dispositions élémentaires prises au moment voulu eussent certainement évité la marche, un mois plus tard, d'une colonne française sur Fez,
Le résultat de l'entêtement borné de M. Re­gnault, à dire que la situation de Fez n'avait jamais été critique, lui faisait ainsi adopter, sans seulement qu'il s'en rendit compte, la thèse alle­mande. Et M. Vassel, le très distingué consul d'Allemagne à Fez, n'avait qu'à citer M. Regnault et sa presse tangéroise et métropolitaine pour prouver qu'il avait raison.




301  
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE
Aussi, lorsque l'expédition ne put plus être évitée, toute la presse allemande fit état de nos propres déclarations pour établir que la prétendue détresse de Fez n'était qu'un prétexte inventé de toutes pièces par la France dans le but de con­quérir la capitale marocaine !

Et M. Jaurès, que l'on voit toujours, dans ces circonstances, adopter la thèse allemande, pou­vait écrire dans son journal, à la date du 26 avril :

"Fez n'est pas serré de près, et, en tous cas, aucun danger ne menace les Européens.... Tout cela n'est qu'un jeu."


Et, il ajoutait, le lendemain :

II paraît bien que la France a été odieusement mys­tifiée par ceux qui ont machiné l'expédition maro­caine.

Ils disaient que Fez allait succomber; que la ville ne pouvait plus se ravitailler. On apprend maintenant que la ville peut tenir longtemps ; et les courriers venus du Maroc établissent que les vivres n'ont même pas haussé, que le blé se vend, comme l'année précédente, trois francs les cinquante kilos, que la viande se vend soixante-dix centimes le kilo. Jamais les communica­tion de Fez à Tanger n'ont été interceptées (sic)...

Tout a été truqué, faussé, grossi pour persuader à l'opinion qu'une grande opération au Maroc était indispensable.




_____

(1) On trouvera tous les documents relatifs à cette époque dans l'ouvrage, très bien présenté, de M. Eugène Tardieu : Le mystère d'Agadir.


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Document hors texte

FEZ. - Le pacha Ben Bouchta El Baghdadi qui devait succéder au fils du Vizir El-Mokri.

HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 A_00_012

El Baghdadi fut le 1er pacha de Fès du protectorat, nommé sur proposition des autorités françaises après les émeutes d'avril 1912. Il préside l'assemblée municipale, dite "Medjless el Medina" ou "Medjless el Baladi" créée par un dahir du 2 septembre 1912 qui en fixe la composition, le fonctionnement et les attributions de cette assemblée. El Baghdadi est resté pacha de Fès pendant une vingtaine d'années.


Dernière édition par Paul Casimir le Lun 7 Juil - 21:37, édité 2 fois
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302
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ


Si nous nous sommes attardé pendant quelques pages à rappeler les événements de 1911, qui sortent du cadre de ce livre, c'est pour bien mon­trer que les procédés de M. Regnault ont tou­jours été les mêmes : ne pas voir lui-même le danger et, quand d'autres le lui signalent, le nier effrontément.

En 1912, il fît donc de même, et, jusqu'à l'arrivée des premiers télégrammes de presse, l'opinion française ne s'était pas rendu compte de la gravité de la situation.

Pour continuer à soutenir le rôle qu'il s'était décidé à jouer, il lui fallait, plus que jamais, couvrir tous ceux qui, de près ou de loin, tou­chaient au Maghzen.
Et il ne recule devant rien pour y arriver. On en jugera par le récit suivant :

On sait déjà (1) que, dans la nuit du 18 au 19 avril, un détachement de la compagnie du capitaine Henry, comprenant quinze hommes, sous les ordres d'un sergent, fut pris dans un guet-apens et enlevé. II y eut neuf tués, dont le sergent, et quatre blessés. Il fut établi aussitôt que le poste avait été trahi par le caïd Hadj-Mohammed-Belhassem, de la casbah des Filala. Ce caïd maghzen, qui jouait le rôle de pacha dans son quartier, situé en pleine ville de Fez, près de la porte Bab-Marouk, fut accusé d'avoir fait massacrer un poste français.


_____


(1) Voir page 104.



303
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE

Une enquête ré­gulière fut ouverte contre lui, quelque temps après, par le service des renseignements.

Le 12 mai, vers 3 heures de l'après-midi, le lieutenant Arnaud, un des officiers les plus dis­tingués de ce service — qui se fît tuer superbe­ment au combat du 20 juillet en chargeant seul tout un groupe de Marocains — se rendit sur les lieux de l'attaque. Remplissant des fonctions ana­logues à celles d'un juge d'instruction, il recons­titua la scène du massacre, en présence du capi­taine Henry, des survivants du détachement, de quelques témoins et de l'accusé, le caïd Belhassem.

Ce dernier, maigre les témoignages écrasants et les preuves accablantes de sa trahison, niait contre toute évidence.

A un certain moment, le lieutenant Arnaud, indigné d'une telle impudence, le rudoya et le traita de menteur.

Qu'avait-il fait ?

Dès que l'interrogatoire fut terminé, le caïd —- qui, bien entendu, était en liberté — se pré­cipita à l'ambassade de France pour se plaindre à M. Regnault du manque de correction du lieu­tenant Arnaud à son égard.



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304
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

Et c'est alors que se passa ce fait incroyable, fantastique, inouï, que nous sommes obligé de préciser, en citant des noms, pour que l'on ne puisse supposer que nous exagérons.

Le ministre de France le reçut immédiate­ment. Et, en présence de ce caïd, accusé d'avoir lâchement fait tuer neuf Français, de cet homme qui, étant sous le coup d'une instruction régulière ouverte contre lui pour crimes de trahison et d'assassinat, n'aurait même pas dû être en liberté, le ministre de France, M. Regnault, prit immé­diatement fait et cause pour lui contre un officier français.

Sans se donner seulement la peine de se ren­seigner, sans même contrôler les dires de cet « excellent fonctionnaire maghzen », il envoya sur-le-champ M. Gaillard, consul de France, auprès du commandant de Lamothe, chef du ser­vice des renseignements, « pour porter plainte contre le lieutenant Arnaud, qui s'était permis de manquer d'égards envers un fonctionnaire maghzen ».

M, Gaillard se borna à exprimer la plainte que son chef lui avait donné l'ordre de transmettre.

On juge de l'étonnement et de l'indignation du commandant de Lamothe, qui déclara simple­ment à l'envoyé de M. Regnault qu'il lui répon­drait par la voie hiérarchique.




305
LES CAUSES REELLES DE L EMEUTE

Le commandant de Lamothe adressa alors un long rapport au général Brulard, dans lequel, malgré son respect pour le ministre, il ne pou­vait s'empêcher de s'étonner de la facilité avec laquelle l'ambassade de France retenait, sans au­cun contrôle, la plainte d'un assassin contre un officier français.

Le général Moinier, saisi à son tour de l'inci­dent, eut un entretien des plus vifs avec M. Re­gnault, auquel il fit remarquer que, lorsqu'il se trouvait, d'une part, en présence d'un homme accusé d'assassinat et, d'autre part, en présence d'un officier français, ses sympathies allaient na­turellement, spontanément, vers l'assassin....

M. Regnault avait cependant reçu, à l'occasion même de cette affaire, une leçon de convenance et de dignité qui, pour tout autre, eût été le pire des affronts.

Il nous est même pénible, à nous Français, de la signaler ; mais nous voulons que le rôle de M. Regnault dans ces affaires soit connu comme il mérite de l'être.

Cet El-Hadj-Mohammed-Belhassen était à la fois protégé américain et protégé français.

Au lendemain du rôle odieux qu'il joua, ne se sentant pas la conscience tranquille, il se présenta au consulat d'Angleterre , chargé des intérêts américains, pour solliciter la délivrance d'un certificat d'honorabilité.



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Document hors-texte



HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 Baasca42


Le commandant Brémond décore deux vieux soldats marocains


Valeur militaire, courage et fidélité, telles sont les vertus que la France a récompensées en décernant la croix de la Légion d'honneur à deux vieux chefs marocains, les caïds MOHAMMED BEN BOUCHTA BEN EL BAGHDADI et BRAHIM BEN AOUDA. Ce sont tous deux de bons serviteurs du Moghreb.

Le premier avait reçu, en 1908, d'ABD-EL-AZIZ, le commandement de la Mehalla envoyée de Rabat à Fez ; il prit part plus tard, aux mois de mars et avril 1911, à l'expédition contre les Cherarda.

Le second, le caîd BEN AOUDA est également loyal soldat, blanchi sous les armes, après trente-neuf années de guerres presque incessantes ; il fut, en 1909, le seul caïd fidèle au capitaine LE GLAY, dans la campagne des Beni-M'Tir.


Tous deux ont reçu la croix des mains du commandant Brémond, en présence des tabors marocains massés à Bab Segma.



Le Petit Journal illustré du 21 Janvier 1912


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306
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ


Bien que le consul d'Angleterre, l'honorable M. Mac Leod, n'eût personnellement aucun motif de le lui refuser, ignorant encore l'affaire de Bab-Marouk, il alla, par un sentiment de correc­tion des plus louables, en référer au chef du ser­vice des renseignements français, afin de lui de­mander si la France ne verrait pas d'inconvénient à ce qu'il délivrât le certificat sollicité.

Le commandant de Lamothe, après avoir vive­ment remercié l'honorable consul d'Angleterre, lui fit part des graves accusations qui pesaient sur son protégé.

M. Mac Leod, sans seulement le laisser ache­ver, lui déclara que, la France pouvant avoir à se plaindre de son protégé, il refuserait tout cer­tificat, pour ne pas contrarier l'œuvre de notre justice.

Ainsi éconduit par le consul d'Angleterre, le caïd Belhasscn eut l'audace de s'adresser, en sa seconde qualité de protégé français, à l'Ambas­sade de France, pour essayer d'obtenir le certi­ficat que venait de lui refuser le consulat d'An­gleterre.
On suppose peut-être qu'il fut aussitôt appré­hendé et jeté en prison, des chaînes aux pieds et au cou ?



307
LES CAUSES REELLES DE L'EMEUTE


Tout au contraire, un accueil charmant lui fut cette fois réservé à l'Ambassade de France, et M. Regnault, le recevant lui-même, lui prodigua toutes les marques d'estime et d'affection aux­quelles avait droit, pour lui, tout fonctionnaire maghzen ou caïd.

Et, sans seulement se donner la peine de de­mander le moindre renseignement à qui que ce soit, il délivra immédiatement au caïd accusé d'assassinat un magnifique certificat, dans lequel il affirmait le dévouement sans bornes de Belhas­sen pour la France et déclarait, comme toujours, que son concours admirable lui avait été des plus précieux pour le rétablissement de l'ordre !...

On comprend maintenant combien dut être violente l'indignation éprouvée par M. Regnault en apprenant qu'un simple petit lieutenant fran­çais s'était permis de traiter de menteur un per­sonnage aussi élevé et surtout aussi dévoué à la France.

On n'a été surpris que d'une seule chose, à Fez, c'est que le digne caïd Belhassen n'ait pas été nommé, comme El-Mokri, grand-officier de la Légion d'honneur et que le criminel lieutenant Arnaud n'ait pas été jeté en prison chargé de chaînes !...


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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyMar 8 Juil - 9:22

308  
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ


M. Regnault et l'autorité militaire.


Les explications que nous avons données et les documents que nous avons publiés prouvent in­discutablement que tout le monde, à Fez, savait que des événements graves se produiraient au moment du départ du Sultan. Ils prouvent aussi que M. Regnault avait dédaigné tous les avertis­sements qui lui avaient été donnés. Cela ne l'a du reste pas empêché d'affirmer continuellement ensuite qu'il n'avait jamais été prévenu.

Ils montrent que la révolte des Askris n'aurait eu aucune gravité et se serait simplement traduite par quelques désertions si les hauts fonctionnaires Maghzen — dont le ministre de la Guerre lui-même — n'avaient incité les hommes à se ré­volter, à tuer leurs instructeurs et à aller s'appro­visionner de cartouches, qui leur furent distri­buées dans les magasins du palais.

Ils sont un témoignage évident que M. Re­gnault couvrit tous les fonctionnaires Maghzen, même criminels, pour pouvoir continuer à dire qu'ils avaient tous été admirables de dévouement et de fidélité, afin de mieux faire retomber toutes les fautes sur l'autorité militaire. Nous allons voir maintenant M. Regnault direc­tement aux prises avec cette autorité militaire et montrer, toujours  par des documents, le rôle qu'il a joué.



309  
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE


Cette partie de notre livre,  croyons-nous,  ne sera pas une des moins impressionnantes.


La situation des plus tendues qui existait entre M. Regnault et l'autorité militaire n'a pas échappé à la clairvoyance de M. Maurice Long, rappor­teur de la commission des affaires extérieures à la Chambre, qui disait (1) :

" L'autorité militaire préoccupée avant tout d'assurer la sécurité à Fez et dans les environs, ne pouvait guère envisager la question sous son aspect politique et administratif. Ce n'rétait pas son rôle et il faut dire aussi que nos généraux, accoutumés à suivre des règles strictes, répugnaient à collaborer avec un personnel maghzen qu'ils estimaient décrié et prévaricateur.

Ces généraux venaient de pacifier la Chaouïa et d'y installer un contrôle direct sur les caïds, en se présen­tant aux indigènes comme des libérateurs venus au nom de la France, pour les affranchir du joug chérifien. L'action de l'autorité militaire hautement affir­mée, s'exerçait donc dans un sens diamétralement contraire à celle de nos agents des Affaires étrangères ".

Voici, d'autre part, dans quels termes le gé­néral Moinier, dans son rapport d'ensemble sur les événements, s'exprime en ce qui concerne les procédés de la Légation de Tanger :


_____

(1) Journal officiel du 28 juin 1912, page 1837.


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Document hors-texte

Panorama de FEZ vu du Nord.

- 1912 -

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310
LES JOURNEES SANGLANTES DE FEZ

" II est nécessaire, à mon avis, de soustraire le Sultan à ces influences mauvaises (celles de son entourage) et c'est pour cela que je crois que son départ de Fez aurait été et est encore souhaitable (1).

Après quelques jours de crises probables, nous au­rions ressenti tous les effets de cette mesure ; nous aurions vu cesser, en particulier, cette fâcheuse immo­bilité que les instructions journalières de la Léga­tion nous obligeaient à conserver vis-à-vis du Maghzen dont elle escompte la collaboration dévouée, et où elle n'a trouvé jusqu'ici qu'inertie et résistance.

Nous aurions pu, comme nous l'avons fait ailleurs, exercer sur la police de la ville, sur son administra­tion, ses finances, une action et un contrôle qu'il nous a, jusqu'à présent, été impossible d'établir ".


La police de Fez et le service des renseigne­ments spécial à sa population ont toujours échappé à l'autorité militaire et même au service des renseignements, chargé seulement des tri­bus (2).


_____

(1) Le général Moinier, contrairement à l'opinion du gé­néral Brulard, estimait en effet que le départ du Sultan était
désirable pour le soustraire aux influences de son entourage. Nous avons vu, en effet, de quoi celui-ci était capable. Mais le général Moinier n'avait jamais conçu un voyage théâtral à la Regnault.

(2) Voici, en effet, ce qu'écrit à ce sujet le commandant de Lamothe :

« Qu'il nous soit permis d'indiquer que si l'autorité militaire ne s'était pas toujours trouvée désarmée en face des fonctionnaires marocains incapables et inertes, et elle ne s'était pas toujours heurtée à un non possumus absolu, si ses plus timides tentatives de contrôle, ses moindres conseils n'avaient pas été dénoncés comme autant d'attentats aux droits souverains du Sultan, d'offenses à la dignité et à la vanité de ses conseillers, si enfin l'abstention ne lui avai pas été imposée, les choses se seraient certainement passées autrement.

« Un peu d'énergie, un peu d'activité auraient suffi, au commencement, pour arrêter l'émeute, au moins pour la localiser.
« Mais il aurait fallu d'autres gens que les pitoyables per­sonnages auxquels la faveur-du Maghzen avait confié la garde de la ville et la sécurité de ses hôtes. Les événements sont assez tragiques pour ne pas être dramatisés. »




311
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE


Chaque fois que le commandant de Lamothe voulait s'occuper des agissements de cette popu­lation, M. Regnault lui répondait officiellement que cela ne le concernait point et qu'il ait à se mêler de ses affaires !

C'est ce que dit encore très nettement le géné­ral Moinier, qui conclut dans son rapport :

" C'est dans ces causes profondes (celles exposées dans la précédente citation) qu'il faut rechercher l'origine du mouvement, et l'impossibilité où s'est trouvée, l'au­torité militaire, et en particulier le Service des ren­seignements de prendre, à Fez, comme il l'a fait dans les tribus, une influence sur laquelle ne peuvent être acceptées les responsabilités que l'on a tenté de, faire retomber sur leur tête. "


On se demandera peut-être, avant d'aller plus loin, la raison pour laquelle aucun soldat fran­çais ne se trouvait dans la ville de Fez au moment des événements, et pourquoi nos troupes, ré­duites à deux bataillons, étaient campées à Dar-Debibagh, à 4 kilomètres environ de la ville.




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Paul CASIMIR





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MessageSujet: HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912.   HUBERT-JACQUES : Les journées sanglantes de fez, avril 1912. - Page 10 EmptyMar 8 Juil - 16:14

312
LES JOURNÉES SANGLANTES DE FEZ

Cela tenait encore aux instructions générales données par les Affaires Etrangères aux colonnes de secours venues à Fez en 1911, instructions qui interdisaient aux troupes régulières d'entrer en ville. Elles n'avaient jamais été rapportées. On devait, en effet, avoir tellement confiance dans le dévouement des fonctionnaires Maghzen à la cause française que c'eût été un grave affront de se faire garder par des soldats français. Et si, même après la signature du traité de protectorat, le général Moinier avait voulu faire participer ses troupes à l'occupation et à la garde de la capitale, le Sultan et la Légation de France n'eussent pas manqué de protester énergiquement :

« Nous sommes les hôtes du Sultan, disait M, Regnault, nous devons nous en rapporter à lui du soin de nous garder. Ce serait faire injure aux gens du Maghzen que de laisser supposer que nous pouvons nous méfier d'eux. »


Sait-on également que jamais un drapeau fran­çais n'avait été hissé à Fez, même sur le Consulat de France?


313  
LES CAUSES RÉELLES DE L'ÉMEUTE


Cela aurait pu choquer nos si bons amis et collaborateurs du Maghzen. Il ne le fallait à aucun prix.

La première mesure qui s'imposait, au soir même de la terrible journée dont nous connais­sons maintenant les détails, était évidemment la proclamation de l'état de siège.

Le général Moinier, qui avait quitté Fez quel­ques jours avant les événements, pour rentrer en Chaouïa, se trouvait, le 17, à Tiflet, entre Meknès et Rabat. Il rebroussa aussitôt chemin et était de nouveau à Fez le 21, à 10 heures du matin.

Le général Brulard, qui commandait les troupes de la garnison, n'avait pas qualité pour procla­mer l'état de siège. Ce droit appartenait à M. Re­gnault seul, qui, immédiatement sollicité par le général Brulard de prendre cette mesure, s'y refusa énergiquement.

Le Gouvernement, sans doute surpris lui-même qu'à la date du 20 avril l'êtât de siège n'ait pas encore été proclamé, télégraphiait au général Moinier, en route sur Fez :

Guerre à Moinier


N° 1991.

20 avril 1912.

Dans circonstances exceptionnelles que traversons, vous avez droit et devoir prendre toutes mesures que jugerez nécessaires dans intérêt sécurité, notamment dispositions analogues à celles prévues pour état siège sous réserve expresse que sitôt rentré en relations avec Ministre France, vous vous mettiez d'accord pour ces mesures avec Regnault.



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